Partage international no 418juin 2023

par Phyllis Creme

Le couronnement du roi Charles le 6 mai 2023 a permis d’observer un curieux décalage, une discordance choquante. Préparée et répétée pendant des mois, la cérémonie à Westminster a été somptueuse. S’appuyant sur des siècles de tradition, elle a coûté des millions de livres sterling et a constitué un spectacle saisissant et mémorable.

La longue traîne de velours derrière le roi lorsqu’il est entré dans l’abbaye, la musique, le globe et le sceptre qui lui ont été présentés, une simple chemise blanche recouverte d’un lourd manteau de fils d’or et d’une cape de fourrure, et la lourde couronne ornée de pierres précieuses qui a été dessinée sur papier par les enfants des écoles primaires de tout le pays. C’était comme regarder un film, une fiction. De temps en temps, ce qui semblait être un gros plan inapproprié sur Charles montrait un homme de 74 ans à l’expression impossible à lire, un contraste avec sa mère, la jeune reine couronnée il y a soixante-dix ans.

Comme prévu, les gens ont fait la queue pendant des jours pour voir le carrosse doré se rendre à l’abbaye et en revenir. Des millions de personnes ont regardé ce spectacle à la télévision dans le monde entier. La cérémonie fut impressionnante et, invoquant des siècles de rituels et de traditions, étrangement émouvante. Le couronnement a été suivi le lendemain d’un long concert et d’une fête des plus extravagantes au château de Windsor, l’une des nombreuses résidences officielles appartenant à la famille royale, ainsi que dans d’autres lieux.

Mais dans les coulisses de ce spectacle aussi grandiose qu’anachronique, il y avait autre chose à voir. En fait, malgré l’importance de la foule présente, la population britannique est aujourd’hui bien moins nombreuse à approuver la monarchie – ou du moins une monarchie dont tant de membres sont soutenus par l’État et disposent d’une fortune privée démesurée.

L’invitation qui avait été faite à l’ensemble de la population britannique de se joindre au serment d’allégeance prêté au roi par l’assemblée [présente à Westminster] a été discrètement oubliée. Des manifestants potentiels ont été arrêtés à titre préventif pour éviter tout trouble à l’ordre public. Tout le monde était censé accepter le statu quo séculaire et le mythe d’une « Grande » Bretagne qui n’est plus aussi grande mais plutôt bêtement isolée après le Brexit. Le fait d’avoir un monarque signifie que nous sommes toujours implicitement invités à nous considérer comme des sujets de la couronne plutôt que comme des citoyens libres.

Photo : Katie ChanCC BY-SA 4.0, via Wikimedia Commons
Ce couronnement, c’était comme regarder un film, une fiction.

Une monarchie beaucoup moins populaire

Pendant ce temps, la réalité en Grande-Bretagne est en total décalage avec une monarchie qui est devenue beaucoup moins populaire et que la plupart des gens aimeraient réduire à un minimum suffisant pour assurer la stabilité, mais en supprimant les privilèges financiers exorbitants de cette famille élargie qui, contrairement à tout le monde, ne paie pas d’impôt sur les successions.

Aujourd’hui, beaucoup de citoyens de Sa Majesté vivent dans le dénuement. Bien qu’elle soit encore riche, la Grande-Bretagne est récemment devenue honteusement inégalitaire. Le faste du couronnement, les invités richement vêtus et la fête extravagante qui a suivi pourraient rappeler les paroles de Maitreya : « Les riches font étalage de leur fortune devant les pauvres. »

La crise du pouvoir d’achat empêche beaucoup de familles de satisfaire leurs besoins les plus élémentaires. Les coûts de l’alimentation et de l’énergie ont augmenté jusqu’à 30 %. Les personnes âgées se voient proposer des « points chauds », par exemple dans les églises locales, alors qu’elles n’ont pas les moyens de se chauffer dans leur propre domicile. Les enfants ne peuvent pas apprendre correctement à l’école parce qu’ils ont faim. On voit des enseignants leur acheter de la nourriture.

Et les gens commencent à protester. De nombreux travailleurs du secteur public se sont mis en grève : les travailleurs des transports, ce qui empêche les gens de se déplacer ; les médecins et, pour la première fois, les infirmières, qui refusent de travailler, non seulement pour protester contre leur faible rémunération, mais aussi pour s’indigner de la faillite du service national de santé, qui faisait autrefois la fierté de la nation.

En contraste avec tout ce faste, Maitreya émerge, comme un « homme simple », pour révéler ce qu’il y a de meilleur en chacun : « Mon enseignement est le suivant : apprenez à partager, à prendre la main de votre frère et à vous reconnaître en lui. » (Maitreya, message n° 91)

Royaume Uni
Date des faits : 6 mai 2023 Auteur : Phyllis Creme, a enseigné à l’université et est correspondante de Share International basée à Londres. Elle était l’épouse de Benjamin Creme.
Thématiques : peuples et traditions
Rubrique : De nos correspondants ()